Guy Bonnaud nous écrit.
Vous ne l'avez pas oublié ?
Il nous envoie de ses nouvelles...
Chers amis,
« Le temps découvre les secrets ; le temps fait naître les occasions ». Cette citation, attribuée à Bossuet, (quoique je ne l’aie pas retrouvée dans mon Lagarde et Michard du XVIIème, que j’ai conservé précieusement bien annoté et bien abîmé) me semble tout à fait convenir à mon propos d’aujourd’hui.
C’est vrai, je n’étais pas des vôtres le 18 septembre, quand vous vous êtes retrouvés après des années de séparation. Je l’ai beaucoup regretté, surtout quand je lis sur le blog tous les commentaires que cette rencontre a inspirés, et que je revois, non sans une immense émotion, toutes ces images de notre jeunesse.
Aussi vous ne m’en voudrez pas si, aux 45 ans passés depuis mon départ du séminaire, j’ai rajouté quatre mois pour vous « découvrir mes secrets », et profiter de « l’occasion » que nous donne l’informatique pour vous faire partager un long temps de mon existence que vous ne connaissez pas.
J’ai donc quitté le séminaire en 1965, après une année de terminale A pourtant heureuse, mais conclue par un échec cuisant au bac (4 sur 20 à l’épreuve de philo, coefficient 8, ça ne pardonne pas…)
Ensuite, redoublement de la Terminale à St Joseph de Fontenay, et cette fois, réussite au bac.
Aussitôt après, je m’inscris en fac de lettres à la catho d’Angers, pour préparer une licence de philo (il ne faut jamais rester sur un échec) que j’obtiens en trois ans.
L’année suivante, je sillonne la Vendée avec ma 2CV pour faire partager aux enfants des écoles ma passion pour l’image filmée ; on appelait cela : du cinéma scolaire.
En août 1970, la République me fait savoir qu’il est grand temps que je consacre un an à servir la nation, avec pour affectation, le Prytanée militaire de La Flèche, comme « soldat éducateur », ce que dans la vie civile on dénomme « pion ». La courte distance séparant La Flèche d’Angers me permet en même temps que le service d’entamer à la catho une maîtrise que je ne mènerai pas à son terme, n’ayant jamais produit le mémoire. Cela me permet surtout de retrouver très souvent aux Ponts-de-Cé une jeune fille prénommée Maryvonne que j’épouse en août 1971, et avec qui nous aurons trois enfants : Anne 1973 – Nicolas 1976 – Agnès 1985.
A la rentrée qui suit mon mariage, je réussis à obtenir un mi-temps d’enseignant sur Angers et Saumur, que je complèterai en donnant des cours du soir dans une école de secrétariat ; l’éventail des matières que j’ai enseignées est vaste : français, philo, latin, géographie et même histoire de l’art.
Au bout de trois années et après une inspection calamiteuse, je finis par convenir que l’enseignement n’était pas ma voie, et je me tourne alors vers les concours permettant d’accéder à la fonction publique hospitalière. Une fois le concours réussi, et un poste étant vacant à l’hôpital psychiatrique de Ste Gemmes-Sur-Loire, (dans la commune où je venais d’emménager) je parviens à obtenir ce poste. Et je suis resté là 32 ans, au milieu des malades mentaux, parias de notre société, avec fonction d’attaché à la direction des admissions et surtout de gérant de tutelle des majeurs protégés.
Juste à mes 60 ans, en septembre 2007, je quitte ma vie asilaire pour embrasser le dur métier de retraité, comme la plupart d’entre vous j’imagine.
En dehors de la vie professionnelle, j’ai consacré bien des heures et bien des soirées à la vie associative, privilégiant les activités tournant autour du chant choral, le social, et l’animation liturgique, sans oublier les joies et contraintes de la vie familiale.
Aujourd’hui, j’ai laissé de côté bien des occupations « profanes » ( mais je suis encore au CCAS de ma commune) pour consacrer une bonne partie de mon activité à l’animation liturgique dans les trois relais qui constituent ma paroisse couvrant 25000 âmes. Le reste du temps, c’est beaucoup de lecture, un peu de jardin, un peu de vélo, pas mal de cuisine (j’adore !), jamais de sieste, et surtout, avec mes 4 petits garçons, cultiver l’art d’être grand-père.
Voilà une vie résumée en quelques mots : une vie imprégnée des valeurs inculquées au séminaire, l’amour du travail, le sens des autres, le goût du beau, la primauté donnée à l’Homme. En revoyant tout ce que le blog nous rappelle, je mesure à présent la chance que nous avons eue de bénéficier de ces années d’internat, même si certaines nous ont paru longues et austères.
Que de souvenirs remontent à ma mémoire en revoyant vos visages et ceux de nos maîtres !
Encore merci à ceux qui ont eu l’audace de provoquer cette rencontre et de ranimer ainsi les liens qui nous ont unis autrefois, pour une nouvelle amitié à reconstituer.
J’attends beaucoup d’une prochaine rencontre, et vous adresse à tous mes très sincères et chaleureux vœux de bonheur pour l’année qui commence.
« Si l’homme vit de longues années, qu’il profite de toutes » (Ecclesiaste XI, 8)
Guy Bonnaud